Le témoignage inspirant d’Aaglenn sur son identité, sa résilience et sa liberté

Bonjour toi,





Je suis ravie de te retrouver avec une nouvelle interview d’un adulte en devenir. Précédemment, tu as pu retrouver l’interview de Laura,place désormais à Aaglenn qui a accepté de se livrer sur son identité, sa résilience et sa liberté.





Peux tu te présenter en quelques mots ?

Je m’appelle Aaglenn, j’ai 26 ans. Je suis une personne AFAB non-binaire transmasculine, et je vis dans la Vienne (86).Je suis passionné par l’histoire et la création, particulièrement en bois et en métal. J’adore les animaux, j’ai trois chiens, deux qui sont les miens : Sherlock, un bouvier bernois de 5 ans et demi qui est mon âme-sœur canine, et Lumos, presque 4 ans, un border collie croisé malinois qui va bien avec mon caractère polytechnicien et productif.

J’ai aussi deux furettes, incarnation de la douceur et de la détermination : Edda, et Khalee. J’adore la nature, parce que je suis né dans la Nièvre et que j’ai en partie grandi dans le Morvan. J’aime faire de la photo, aider les gens, rendre service, lire et écrire, principalement du fantasy.

Que fais-tu dans la vie ?

Actuellement, je suis en arrêt post opératoire de ma mastectommie, mais je ne retournerais pas travailler dans l’entreprise où j’étais : je faisais du téléconseil. Je souhaite travailler en atelier, pour devenir métallier. Je cherche donc actuellement à me reconvertir. Je fais également de la garde d’animaux et je propose mes services en tant qu’écrivain public. Sinon, ma vie est composée d’écriture, de prendre soin de mes chiens et de ma compagne, de création dans mon atelier, de photos, et de rendre service à des gens. Notamment en allant faire des travaux chez les grand-parents de ma compagne.





Comment tu décrirais ton enfance ?

Je n’ai manqué de rien. Je la décrirais comme insouciante. Mon enfance était une période où je pouvais m’immerger dans mon imagination et vivre des aventures incroyables.
A l’école, c’était un peu compliqué, mais chez mes parents, je passais beaucoup de temps à lire et à jouer dans le jardin, et le weekend, chez mes grand-parents, je passais mon temps à me balader dans les montagnes ou à suivre mon grand-père pour l’aider.

As-tu des frères et soeurs ? Quels sont vos rapports au fil du temps ?

J’ai un frère, de trois ans mon cadet. Quand nous étions petits, je l’entraînais dans mes univers imaginaires, les lui décrivant et lui donnant un rôle.Lorsqu’il a grandi, nos relations se sont dégradées, nous passions notre temps à nous disputer. C’est même devenu assez violent. Puis je suis parti de la maison et désormais, nous n’avons plus de relations.

Quel est ton meilleur souvenir d’enfance ?

Mon meilleur souvenir d’enfance… C’est une question difficile.
Je ne pense pas être capable d’en choisir un, mais je dirais que mes périodes préférées durant mon enfance étaient celles que je passais chez mes grand-parents paternels dans le Morvan. Mon grand- père me faisait faire des activités (bricolage, jardinage…), de longues balades durant lesquelles il me donnait des détails de sa vie ou de son enfance. Ma grand-mère me faisait faire des gâteaux et m’emmenait à des brocantes.Et tous les mois d’avril, pendant les vacances scolaires, nous partions tous les mois en camping-car pendant une semaine pour visiter la France : châteaux, églises, belles vallées, musées… Le programme était bien planifié et nous passions de très bons moments.

As-tu effectué une crise d’ado ? Comment elle s’est caractérisée ?

J’ai eu une première « crise d’ado » entre mes 14 et mes 18 ans, où j’avais surtout la haine contre mon père et où je remettais en question le contrôle de mes parents sur ma vie. Mais j’estime que ma vraie crise d’ado, ça a été vers 20/22 ans, lorsque je me suis émancipé de l’autorité et du contrôle de mes parents. C’est là que j’ai fait des tests et que je me suis réellement opposé à leur autorité. C’est aussi là que j’ai commencé ma transition de genre. Pour moi, ma crise d’ado a été retardée par la dysphonie de genre, parce que je n’étais pas moi.

Aimais-tu l’école ?

J’aimais l’école, et je ne l’aimais pas.J’aimais apprendre, j’aimais aller au CDI, j’aimais les cours d’histoire, de français, de littérature et certaines années de langue et de sciences. J’aimais aussi pouvoir écrire en parallèle de ma prise de note pendant les cours.
Je n’aimais pas l’école, parce que j’y étais harcelé. En primaire, j’étais seul et parfois, je me faisais tabasser par les garçons, avec qui j’aurais plutôt voulu jouer.
Au collège, même histoire, sauf que pendant la récré, je pouvais me réfugier au CDI et qu’en 4è, je suis devenu ami avec une fille de qui j’étais amoureux et qui m’avait intégré à son groupe d’ami. J’étais un peu protégé, jusqu’en première, où je n’avais plus trop le temps de penser, j’avais un planning très chargé entre la conduite, ma 1ère dan de judo et mon bac.

Est-ce qu’il y a des choses de ton enfance qui te manquent ?

Oui, mon insouciance. Ma capacité à m’immerger dans une bulle qui me protège des agressions extérieures. Et ma pré-puberté. Avant de devenir une fille.

Quelle est ta définition de « devenir adulte » ?

Pendant très longtemps, j’ai cru qu’être adulte, ça voulait dire « ne plus ressentir d’émotions positives », juste parfois, ou souvent c’est selon, de la colère. Aujourd’hui, ma définition de « être adulte », c’est sentir au fond de soi qu’on est adulte. Qu’il y a cette maturité. C’est une question que je me suis longtemps posé, en me disant : je ne me sens pas adulte, je ne suis pas responsable, je n’ai pas de job stable, des dettes…

Est-ce que tu te sens adulte ?

Selon ma définition, bien que je n’ai rempli aucun critère coché par la société, je commence à me sentir adulte.

À quel moment tu t’es dit « ça y est je suis adulte » ?

Je n’ai pas de moment particulier. C’est venu petit à petit, lorsque j’ai voulu être plus indépendant des « adultes », être capable de me débrouiller dans mes problèmes et gérer ma vie, être capable de dire « non » quand des adultes voulaient organiser quelque chose, ou bien nous impliquer.

Une anecdote particulière à raconter ?

Dernièrement, nous avons eu des problèmes financiers, notamment, et nous nous sommes débrouillés pour gérer la situation seuls. Alors bien sûr, ce n’est pas aussi facile que sans nos parents, en l’occurrence, mes beaux-parents.Nous avons déménagé, mais nous l’avons fait seuls, parce que nous ne voulions pas que ma belle- mère gère tout, y compris l’heure et les gens présents.

Et je me suis senti adulte lorsque je leur ai fait comprendre que nous voulions nous débrouiller seuls et que mon beau-père m’a prêté son camion, qu’il ne prête d’ordinaire jamais.

Quels sont les points positifs de la vie d’adulte ?

Je me libère de la gestion de mes parents. J’ai le choix de ma vie, je n’ai plus à subir leur jugement. Sans cela, je n’aurais jamais pu faire ma transition de genre, qu’iels n’ont pas du tout accepté. Et puis je peux m’amuser comme un enfant avec les capacités d’un adulte.

Quels sont les points négatifs de la vie d’adulte ?

L’obligation sociétale : devoir travailler pour avoir le droit de vivre, passer l’essentiel de son temps à cela, devoir gérer tout un tas de choses, avoir des devoirs qu’on a pas demandés et que personne ne nous enseigne, faire face aux difficultés financières, se sentir impliqué dans toutes sortes de responsabilités, notamment écologiques, politiques…

Autre point négatif majeur : quand on devient adulte, les problèmes que je rencontrais et que je pensais qui passaient avec l’arrivée à l’âge adulte, c’est à dire le mensonge, la violence, la malhonnêteté, la médisance, le chantage etc. existent toujours. Les enfants sont simplement de minis adultes.

Quel est ton plus grand rêve dans la vie ?

Je rêve de pouvoir retrouver cette forme d’insouciance et d’écrire mes histoires, de pouvoir devenir forgeron et de voyager autour du monde dans un van aménagé. Bref, vivre libre, en dehors des contraintes de la société.





As-tu peur de grandir, vieillir ?

Non, mon grand-père paternel est mon modèle, je voudrais être comme lui.

Est-ce que tu ressens une pression sociale ? Comment tu la gères ?

Oui, immense. J’ai du mal à me lier avec les autres, j’inspire d’abord confiance et ensuite, je n’attire plus les gens et eux tombent de leur piédestal et ne m’intéressent plus.
J’ai donc beaucoup de pression dans mes relations sociales, et je ne la gère pas du tout. J’ai un trouble de la personnalité borderline, donc dans un premier temps, j’idéalise la personne, puis je mets brusquement fin à la relation.

Est-ce que tes priorités ont évolué en grandissant ?

Malheureusement, ma priorité est, contrainte et forcée, devenue le fait d’avoir suffisamment d’argent pour vivre correctement. Mais au fond de moi, ma vraie priorité est toujours d’être épanoui et de faire des choses que j’aime.

Est-ce-que tu prends encore en compte l’avis de tes parents ?

Non, je ne le prends plus en compte, parce que de toute façon, je ne suis pas la fille qu’ils auraient voulu avoir. Ni même l’être qu’ils auraient voulu avoir. Mes parents m’ont formaté pour aimer lire et écrire, être ce qu’iels appelaient un intellectuel. Dans la Nièvre, tu suis sois un parcours dit « manuel » en faisant un apprentissage, soit intellectuel, en allant à la fac.

Mes parents n’ont jamais été satisfaits de moi, et depuis ma transition, leur opinion et leur avis n’a plus d’importance pour moi. J’ai passé les 6 dernières années à me défaire du poids de leur jugement. Le plus ironique, c’est que j’ai des dreads et des tatouages, ce que ma mère a en horreur, mais je ne les ai pas faits contre elle. Je les ai faits parce que j’en avais envie.

Comment tu vois la société actuelle ?

Pourrie. A mon sens, il faudrait destituer tous les dirigeants, et re-répartir les richesses dans une parfaite égalité afin que chacun.e puisse faire ce qu’iel lui plait et qui lui.elle permet de s’épanouir. A l’échelle du monde entier. Foutre la paix aux gens, que les gens se foutent la paix entre elleux, que chacun puisse vivre gentiment sa vie.

Avec du recul, est-ce que tu imaginais ta vie de cette façon ?

Non, absolument pas. Je suis exactement ce que je voulais ne pas être : sans diplôme, à faire un job alimentaire, en difficulté financière permanente qui m’empêche de m’amuser, m’angoisse beaucoup et provoque beaucoup de tensions.

As-tu réussi à trouver un équilibre dans la vie ? Es-tu Heureux dans ta vie ?

Non, mon équilibre est précaire, et j’ai beaucoup de mal à constituer des routines qui me permettent d’avancer comme je le souhaiterais. Quant à être heureux… je le suis par intermittences.

Comment la perception de toi a évolué au fil du temps ?

Enfant, je m’aimais bien. Adolescent, je me suis dégoûté, par dysphorie. Aujourd’hui, je commence à me sentir bien dans mon corps et je commence à gérer mon trouble borderline, donc je dirais qu’elle a évolué de la détestation de moi-même à l’acceptation et la gestion.

Que dirais-tu à ton « toi petit » ?

Vaste question ! Je pense que je commencerais par lui dire que je ne suis pas une fille. Mettre des mots sur ce que je savais déjà inconsciemment.Je lui dirais également que ma famille ne va pas accepter et qu’il va falloir me battre.Je lui dirais enfin d’aller au collège qui fait de la métallerie et ferronnerie juste à côté de chez mes parents, et de suivre cette voie. En bref, je lui dirais de ne pas écouter les adultes, mais son instinct.

Si tu as un enfant, quel est LE conseil que tu lui donnes dans la vie ?

Suis ton instinct, et fais ce qu’il te plait. Trouve ce qu’il te plait en suivant ton instinct, il ne te mentira pas, et bats toi pour l’obtenir. Parce que personne ne le fera pour toi et la plupart du temps, si ta simple existence indispose quelqu’un d’autre, sa réponse sera en complète démesure au préjudice subi.

Un mot de la fin ?

C’est drôle, que je me trouve à remplir ce questionnaire alors que je commence seulement à me sentir adulte et que je suis en pleine réflexion sur ce que ça veut dire pour moi, en plein combat pour l’être pleinement. Je te remercie donc pour ta contribution à ma vie.





Merci à toi d’avoir accepté de te livrer dans cette interview. Vous pouvez suivre l’instagram devenir adulte et on se retrouve très vite pour le bilan de l’année 2024.





A très vite

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