Bonjour toi,
Je suis ravie de te retrouver pour une interview d’une adulte en devenir. Laura a gentiment accepté de se confier sur son enfance, le décès de ses parents et sa vision de la société actuelle.
Peux tu te présenter en quelques mots ?
Je m’appelle Laura, j’ai 32 ans, maman et en couple depuis presque la moitié de ma vie, et auto-entrepreneuse dans le domaine de la création : les peluches au crochet. J’adore pouvoir apporter de la douceur aux humains en ces temps difficiles, et rien de mieux qu’une belle peluche unique pour ça.
Enfance
Comment tu décrirais ton enfance ?
J’ai très peu de souvenirs de mon enfance, mais si je devais mettre un seul mot sur cette période, je dirais la solitude. Des parents qui se séparent dans un climat si violent (j’ai tout vu tout vécu de ce moment-là, ils ne m’ont pas protégé de ce déchirement brutal d’une famille que je pensais solide), puis devoir me débrouiller seule par délaissement. On part pas sur un super souvenir lol
As-tu des frères et soeurs ?
J’ai une demie soeur et une demie frère, les premiers enfants de mon père. J’ai coupé les ponts avec mon frère et les relations avec ma soeur sont plutôt cordiales, mais on n’est pas proches. Nous n’avons pas grandis ensemble.
Quel est ton meilleur souvenir d’enfance ?
Mon meilleur (et sûrement le seul lol) souvenir, c’est d’avoir vu la trottinette de mes rêves au pied du sapin, je devais avoir 7/8 ans.
As-tu effectué une crise d’ado ?
Oula oui, l’adolescence c’était quelque chose. Ayant vécu la séparation brutale de mes parents, le délaissement de mon père et les absences de ma mère (vive le taf…), j’ai fait tout un tas de bêtises que je préfère garder pour moi, je ne voudrais pas donner d’idées aux plus jeunes.
Aimais-tu l’école ? As-tu fait des études post-bac ?
J’aimais bien l’école primaire, du peu de souvenir que j’en ai. J’adorais ma maîtresse de CP (avec qui j’ai repris contact en début d’année, nostalgie à fond) et particulièrement celle de CE2, qui était d’une douceur, mais malheureusement elle est décédée un an après que je sois passée dans sa classe. Au collège j’aimais bien jouer les rebelles (sécher quelques cours de 8 à 9h pour boire un café avec mon meilleur pote qui n’était pas dans la même classe que moi, donc j’adaptais mon planning au sien lol) mais j’étais plutôt bonne élève quand même. J’ai stoppé l’école peu après l’entrée en seconde car je m’ennuyais en cours. J’avais choisi une filière pro par défaut et ça ne me correspondait pas.
Est-ce qu’il y a des choses de ton enfance qui te manquent ?
Suite à divers trauma émotionnels, j’ai malheureusement peu de souvenirs de mon enfance (en famille surtout), donc rien ne me manque vraiment, si ce n’est ma mémoire.
Adulte
Quelle est ta définition de « devenir adulte » ?
Comme je dis souvent, devenir adulte c’est tellement nul : les responsabilités, l’argent à gagner, les factures, les idées pour des repaaaas bordel.
Est-ce que tu te sens adulte ?
Je me sens adulte quand il faut payer l’URSSAF, remplir les feuilles d’impôts, appeler les organismes divers, mais en dehors de ça je me sens plutôt comme une vieille ado qui veut juste sa liberté comme avant. Mais je crois que c’est propre à la génération 90′ ça !
À quel moment tu t’es dit « ça y est je suis adulte » ?
J’ai pris conscience du cap « adulte » quand j’ai eu mes enfants, quand j’ai construis ma famille et quand j’ai monté ma petite entreprise. Toutes ces choses auxquelles on ne pense pas quand on est gamin finalement.
Quels sont les points positifs de la vie d’adulte ?
Les points positifs de la vie d’adulte, c’est avoir la reconnaissance de petits humains qui sont trop contents quand maman fait des crêpes par exemple. Il y a aussi les moments où on fait des gâteaux ensemble en se partageant les tâches (l’une casse les oeufs, l’autre verse la farine etc), d’adopter des animaux sans attendre l’approbation de qui que ce soit (en étant raisonnable hein, il faut être responsable), de faire la déco de Noël comme on veut, il y a une certaine liberté « plaisir » disons.
Quels sont les points négatifs de la vie d’adulte ?
Les points négatifs, LOL, le travail (particulièrement les auto-entreprises dans lesquelles on doit se plonger corps et âme pour essayer d’en vivre), les cotisations urssaf qui font mal aux fesses, le ménage, les courses, les repas à préparer, se lever tôt pour profiter du calme avant de réveiller les enfants etc. La liste est longue.
Quel est ton plus grand rêve dans la vie ?
Mon plus grand rêve serait de développer ma petite entreprise pour pouvoir en vivre pleinement, et vivre dans un autre pays avec ma famille pour pouvoir nous épanouir réellement.
Grandir
As-tu peur de grandir, vieillir ?
Quand j’étais petite, j’avais hâte de grandir. Maintenant que je suis grande, j’ai peur de vieillir j’associe trop souvent la vieillesse comme l’apparition des maladies typique de vieillesse (cardio, arthrose, faiblesse osseuse, augmentation de tout types de risques de santé etc). Je travaille dessus en me disant que la vieillesse est un privilège qui n’est pas donné à tous le monde, et qui n’a pas non plus été donné à mes parents (mère décédée à 47 ans, père décédé a 65 ans, tous les deux d’un cancer).
Est-ce que tu ressens une pression sociale ?
Oh oui la pression sociale on l’a ressent constamment, la peur de mal faire, d’acheter de la nourriture de qualité moyenne mais culpabiliser de se dire qu’on peut financièrement pas toujours faire mieux, puis faire en sorte que les enfants grandissent bien sans qu’ils deviennent des enfants rois. Beaucoup de contradictions entre la société très bancale et les valeurs qu’on souhaite transmettre. Alors j’essaie de m’en fiche, je me dis que tant que mes enfants se sentent bien, qu’ils ont de quoi s’habiller et qu’ils mangent à leur faim, c’est tout ce qui compte. Le bien-être de mes enfants est ma priorité.
Est-ce que tes priorités ont évolué en grandissant ?
Comme dit précédemment, ma propriété c’est mes enfants, et forcément ma famille donc également mon couple. Je dirais globalement que le bien-être de ma famille est prioritaire. Mes parents sont décédés donc je ne me préoccupe pas de ce qu’ils peuvent penser aujourd’hui. J’essaie déjà de me préoccuper de ce que je pense de moi-même en tant que maman et femme, c’est déjà pas mal. De leur vivant, mes parents ne me donnaient jamais leur avis sur ma vie ou sur la façon d’éduquer mes enfants. Ma mère était extrêmement proche avec mon premier enfant. Elle a eu la chance d’être grand-mère avant de quitter ce monde, mais elle n’est jamais intervenue dans l’éducation que je lui donnais.
Comment tu vois la société actuelle ?
La société actuelle…. Joker. je dirais simplement que j’ai le mal du pays depuis un certain temps, je ne me sens plus à l’aise ni en sécurité dans mon propre pays, que ce soit pour moi ou pour mes enfants.
Avec du recul, est-ce que tu imaginais ta vie de cette façon ?
Non je ne voyais pas ma vie comme ça. J’ai vécu des abandons, des injustices, toujours à être le vilain petit canard car il fallait bien un coupable aux drames de mes « proches », même au décès de mes parents, certaines personnes ont eu l’audace de dire que c’était de ma faute. Beaucoup de choses qui font qu’aujourd’hui je vis avec des traumas (dont certains sont un mystère non résolu) qui ont provoqué un espèce de black-out de plusieurs années dans mon enfance, de l’anxiété au quotidien et d’autres trucs pas bien joyeux. Aujourd’hui mes enfants et mon conjoint sont ma seule et unique force en ce bas monde.
As-tu réussi à trouver un équilibre dans la vie ?
À 20 ans (+11 enfin +12 bientôt mais chut laissez moi tranquille), je cherche encore l’équilibre parfait. Je suis quelqu’un qui est terriblement nulle en organisation donc entre les enfants, mon couple, la maison, mon entreprise (les finances surtout, parce que fabriquer c’est bien, mais vendre c’est bien aussi lol), et un peu de temps pour moi, j’avoue que l’équilibre est difficile à trouver. Ajoutez y une pincée de dyslexie, une grosse cuillère a soupe d’anxiété et un peu de tdah et vous avez la recette parfaite de la désorganisation. Il y a des jours avec, où je me sens à peu près bien et organisée, et des jours sans, où j’ai la flemme de tout. Je jongle avec ça au quotidien mais ça va, je pense que je suis un bon funambule. Dire que je suis heureuse est un grand mot, car les traumas continuent aujourd’hui à me titiller l’esprit, mais je vis heureusement des moments joyeux et sincères.
Comment la perception de toi a évolué au fil du temps ?
J’avoue qu’au fil des années j’ai du mal a reconnaître la personne que je suis. Je me sens pas toujours bien dans ma peau, très à l’étroit dans ma tête pleine de pensées parasites, le visage fatigué et marqué par l’anxiété quotidienne. Depuis le décès de mes parents, j’ai perdu ce rôle d’enfant que j’avais, donc je me cherche en tant qu’adulte mais sans cadre de référence stable, c’est pas évident. C’est un peu comme quand on apprend à faire du vélo, on a les parents derrière nous, jusqu’à ce qu’on arrive a pédaler seul, et les parents ne sont plus là. Sauf que moi, j’ai cette sensation qu’ils sont partis avant que je ne réussisse à pédaler seule en confiance. Bien sûr je travaille dessus, mon entreprise m’aide aussi a avoir confiance en moi, ma famille également est très présente pour m’aider à trouver le calme intérieur. Je suis bien entourée malgré tout ce brouhaha dans ma tête. Je me dis que tout finit par passer, même les plus gros ouragans laissent toujours place au soleil.
Que dirais-tu à ton « toi petit » ?
Je dirais à mon mini moi de profiter de papa et maman, parce qu’ils partiront trop tôt, donc en profiter pour ne rien regretter. Leur dire qu’on les aime surtout, c’est important et de ne pas se disputer avec eux pour des choses futiles. Se dire qu’il y aura des chutes, des larmes, des drames, mais qu’il y aura aussi des joies, des rires, et que l’un amènera a profiter de l’autre plus sincèrement. De ne jamais douter de son esprit créatif qui l’a conduira plus tard à tout faire pour vivre de ses passions. Puis surtout croire en elle, car même si la vie est dure, elle promet aussi de beaux moments. Qu’elle sera forte malgré les épreuves et qu’elle sera quelqu’un de bien, quoique les autres en disent.
Si tu devais donner un conseil dans la vie ?
Si j’avais un conseil à donner je dirais de toujours se relever. Il y a une réplique de Stallone dans Rocky Balboa que j’affectionne particulièrement et qui dit « Je vais te dire un truc que tu sais déjà : le soleil, les arcs-en-ciel, c’est pas le monde. Y’a de vraies tempêtes, de lourdes épreuves. Aussi grand et fort que tu sois, la vie te mettra à genoux, et te laissera comme ça en permanence si tu la laisses faire. Toi, moi, n’importe qui, personne ne frappe aussi fort que la vie. C’est pas d’être un bon cogneur qui compte. L’important, c’est de se faire cogner et d’aller quand même de l’avant. C’est de pouvoir encaisser sans jamais, jamais flancher. C’est comme ça qu’on gagne ».
Quel est LE conseil que tu donnes à tes enfants, dans la vie ?
Alors j’ai deux enfants, que j’aime profondément. Je leur dirais (je leur dis déjà) de se faire confiance, de discuter quand ça ne va pas (et quand ça va aussi hein), qu’il n’y a aucun tabou, et que je serais toujours là quoiqu’il arrive. Elles savent qu’elles pourront toujours trouver un point de chute dans mes bras, ça leur donne un sentiment de sécurité puissant (celui que je n’ai pas eu à leur âge, donc c’est important pour moi de ne pas refaire les mêmes erreurs que mes parents).
As-tu une citation qui te suit dans la vie ?
Une citation qui me suit, je dirais qu’au dessus des nuages il y a toujours le soleil. Ne pas croire qu’une petite période négative définie la vie toute entière.
Un mot de la fin ?
Un mot pour la fin ? Fin ! Lol Non je dirais simplement à ceux qui sont arrivés jusqu’ici, déjà bravo parce que c’est long, et ensuite je dirais a ces personnes de toujours croire en eux, en ce qu’ils sont. C’est pas parce que la vie te met à terre qu’il faut faire la crêpe. Relève toi et montre à toi-même que tu es capable du meilleur.
Je voudrais simplement rajouter pour conclure que j’ai bâti ma vie professionnelle à travers ma créativité. Depuis plus de 10 ans j’enchaîne les petites entreprises pour nourrir ma créativité. Passant des pâtisseries aux attrapes rêves, à la résine époxy, à la couture bref, le travail manuel c’est vraiment mon dada absolu. À présent ma passion se mêle à une valeur dont on a tous besoin en ce moment : la douceur. Et quoi de mieux qu’une belle peluche ultra douce pour se remonter le moral, rendre le sourire à un enfant (oui bon, a 20, 30 ou 40 ans on reste toujours un peu enfant non ? ), ou simplement apporter de la douceur dans une pièce de vie.
Ma vie tourne autour des peluches que je crée moi-même avec beaucoup d’amour et de minutie, alors si tu veux une mignonnerie, si Soraya le permet, je t’invite à consulter le lien de ma boutique Le crochet de Laura. Merci pour cette interview qui m’a permis de revoir des petits souvenirs positifs qui font du bien.
Merci à toi Laura d’avoir accepté de te confier et d’avoir pris le temps de répondre à mes questions. Je vous invite à consulter son travail sur son site Internet ou ses réseaux sociaux (@lecrochet_delaura). Tu peux découvrir l’interview de Maxime l’interview de Maxime. sur l’amour et également me rejoindre sur l’instagram devenir adulte.
A très vite